samedi 28 mars 2009

Quelques mesures de Glenlivet

C’est en train de devenir un rendez-vous annuel, autour du Salon du livre de l’Outaouais. Mon vieil ami Stanley Péan, que j’ai connu il y a 15 ans lors du 15e SLO, débarque en ville et nous passons la soirée à discuter autour d’une bonne table en descendant quelques bouteilles de rouge.

Hier, nous avons troqué le resto pour la chaleur de la belle maison de Christine Moisan et de son chum, Patrick Millot. Je connais Christine depuis l’époque où je vivais à fond ma bohème dans les folles nuits du vieux Hull, mais je rencontrais Patrick pour la première fois. Belle rencontre où il a été question de musique, de bouffe (Christine a longtemps tenu la chronique resto à Zone puis à Voir), de médias, de syndicalisme, de littérature, de notre génération (X). Nous sommes finalement convenus que nous avions assez bien réussi notre vie pour des représentants de cette génération que l’on disait perdue. Ne manquait que ma douce moitié, Sylvie, occupée par la Journée mondiale du théâtre.

Stanley nous a encore épaté avec sa mémoire fabuleuse. Nous avons partagé quelques anecdotes savoureuses à propos de gens que nous avons connus dans des lieux, des circonstances et des époques différentes. Nous avons rigolé, mais nous nous sommes aussi indignés. Bref, une soirée comme je les aime, qui s’est terminée assez tôt, un peu passé minuit le soir (une série que nous avons tous aimée), après quelques mesures de Glenlivet. Après tout, nous devions tous être frais et dispos pour vaquer à nos occupations respectives, ce matin (le boulot, essentiellement!). La génération X ne connaît pas les congés de fin de semaine. Et nous ne nous en portons pas plus mal.

Nous avons quitté Patrick et Christine en nous donnant rendez-vous en juin, lors du prochain passage de Stan dans la région. Je l’ai déposé à l’hôtel puis je suis sagement rentré en taxi en me disant qu’il fallait refaire ça plus souvent. Il en va de l’hygiène de l’écrivain!

mardi 24 mars 2009

Surgi du passé

Vendredi soir, j'ai reçu un coup de fil de Marcel Gingras, que j'ai connu à l'époque où j'arrivais en poste aux Éditions L'Interligne. Marcel venait de publier une monographie intitulée Diefenbaker et le Canada français, qui prenait appui sur sa relation professionnelle avec l'ancien premier ministre canadien, alors qu'il était correspondant parlementaire J'ai tout de suite aimé cet homme frêle que je trouvais déjà vieux, du haut de mes vingt-sept ans!

Marcel, avant de prendre sa retraite, a occupé plusieurs emplois, de traducteur à journaliste à je ne sais trop quoi encore. Il a aussi été, à une époque plus glorieuse du quotidien, rédacteur en chef du journal LeDroit.

Homme de goût, Marcel collectionne depuis toujours les livres et les tableaux. Les murs de sa maison de Vanier affichent quelques bijoux de la peinture du 20e siècle d'ici. Il a même publié, avant son Diefenbaker, un fort beau livre sur Henri Masson, aux éditions Marcel Broquet.

Son appel, donc, mettait fin à quatre années de silence, quatre années sans un mot échangé, depuis ces bons voeux de 2005 où nous nous promettions d'aller manger ensemble. J'aimais bien nos sorties du midi au Press Club, « qui n'est plus que l'ombre de lui-même », m'a informé Marcel.

Il m'appelait pour me corriger. Lecteur assidu du journal, il conserve, à 82 ans bien sonnés, un œil vif et l’esprit alerte. « Dans la lettre que vous adressez à Mgr Ébacher, vous affirmez que l'évêque du Brésil a excommunié la fillette. C'est faux. On n'excommunie pas les victimes. » Une petite précision qui m'a fait sourire et m'a rappelé qu'il me livrait toujours de judicieux commentaires lorsque paraissaient mes lettres aux journaux, à une autre époque.

Nous avons pris des nouvelles de nos proches et j’ai appris qu’il comptait bien demeurer chez lui tant et aussi longtemps que sa santé le lui permettra, tout près de ses livres, de ses toiles et de son jardin. Nous nous sommes promis d'aller manger ensemble, ce printemps. Je compte bien tenir cette promesse.

vendredi 20 mars 2009

Sans dessein

J’aime bien cette expression. Elle résume ce que je pense des adeptes du créationnisme (qui parlent, pouvez-vous le croire, de « dessein intelligent »!), des ministres fédéraux qui réfutent la théorie de l’évolution, des tatas qui sonnent à ma porte pour m’informer de la fin du monde, du directeur de la revue Égards et de quelques autres bigots qui me hérissent le poil.

Mise à jour

LeDroit a finalement publié ma réponse à Roger Ébacher, non sans en avoir coupé quelques lignes (ce qui est tout à fait correct) et changé le titre (ce qui mérite ici précision) : de fait, j’avais intitulé mon texte « Au correspondant Roger Ébacher », omettant délibérément son appellation hiérarchique. Pas plus que je ne donne du « Colonel » à un officier de l’armée, je ne souhaite m’adresser aux leaders ecclésiaux autrement que par un poli « Monsieur ». C’est pour moi une question de principe. Je ne suis soumis à personne et je ne m’en porte que mieux.

La liberté de pensée est sans doute le bien le plus précieux que nous ayons. Emmanuel Kant (que j’ai trop peu fréquenté), vulgarise ici très bien ce que sont les Lumières.

Enfin, je me suis procuré ici un modèle d’acte d’apostasie. Je n’y avais jamais réfléchi sérieusement. Mais, ces jours-ci, ce geste m’apparaît fort signifiant. J’y reviendrai.

mercredi 18 mars 2009

Vaticaneries

Le 8 mars, Journée internationale de la femme, le Vatican y va d'une déclaration tout indiquée pour l'occasion, affirmant que la machine à laver est ce qui a le plus contribué à l'avancement de la cause des femmes!

Hier, le pape Benoît XVI, en route pour un périple qui lui fera visiter le continent africain, où le VIH-sida fait des ravages sans précédent, y est allé d'une autre affirmation qui en dit long sur son « infaillibilité ». Selon lui, non seulement le condom serait inefficace pour prévenir le virus, mais il aggraverait le problème.

Vous en voulez encore? La semaine dernière, un évêque brésilien ultracatholique (serait-ce là un pléonasme?), a excommunié une fillette de neuf ans enceinte d'un violeur, la mère de celle-ci et l'équipe médicale qui a procédé à son avortement, allant même jusqu'à affirmer que « le viol était moins grave que le meurtre ».

N'en jetez plus, la coupe est pleine! Je songe sérieusement à faire acte d'apostasie.

Et hier encore, dans le journal local (LeDroit), l'évêque du diocèse de Gatineau, Roger Ébacher, y allait d'une lettre mièvre à laquelle j’ai réagi dans le texte ci-dessous (et que le journal n’a pas publié).

Le religieux dans toute sa splendeur, vraiment. On comprend mieux maintenant pourquoi les évêques et le pape se pavanent avec des coiffes grotesques. Espérons quand même que cesse ce freak show!

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Au correspondant Roger Ébacher,

Monsieur, dans votre lettre publiée le 17 mars, vous revenez sur la décision de votre confrère évêque, José Cardoso Sobrinho, d’excommunier la fillette brésilienne de neuf ans enceinte de son beau-père abuseur, sa mère et l’équipe médicale qui a procédé à l’intervention. Cette histoire a fait le tour du monde et soulevé l’indignation de la plupart des gens de bonne volonté.

À la lecture de votre lettre, j’ai ressenti un certain malaise qui s’est ensuite mué en un malaise certain. D’abord, vous parlez du « drame de cette femme brésilienne, mère d'une fillette de neuf ans enceinte de son beau-père [qui] a été excommunié par son évêque […] Sachez, monsieur, que le drame de cette femme (et de sa fillette) n’est pas d’avoir été excommunié par un évêque indigne de porter le titre de monseigneur, mais bien que la petite ait été abusée sexuellement par un pervers.

Ce qui me dérange, dans votre intervention publique, ce sont la timidité avec laquelle vous discutez du flagrant manque de jugement de M. Sobrinho et la façon insidieuse que vous avez de ramener le débat à un « drame de conscience ». Mais cela ne devrait pas nous étonner. Depuis des années, les leaders de votre Église, monsieur, continuent de faire la preuve, par l’absurde, qu’ils ne sont plus en phase avec la réalité. Reconnaître leurs torts semble, pour la plupart d’entre eux, un concept au-delà de leur force.

Dans le cas qui nous intéresse, il est clair que la décision prise par la mère et les médecins était la seule possible. Non pas parce que la fillette était enceinte de jumeaux, mais parce qu’une enfant de neuf ans ne peut pas être mère.

Je ne comprends pas les élans de compassion conditionnels de votre Église, qui ramène toujours à l’avant-plan, dans votre esprit, la primauté du droit canon. L’évêque Sobrinho devrait être relevé de ses fonctions par ses supérieurs. Mais je ne me fais pas d’idée; ce serait leur demander de faire preuve d’un courage qu’ils ont depuis longtemps abdiqué, l’eussent-ils déjà eu.